Des témoins privilégiés de la vie de Marie-Catherine de Saint-Augustin
Père Jean Eudes (1601-1680)
Catherine Simon de Longpré a grandi chez ses grands-parents maternels, à Saint-Sauveur-le-Vicomte, en Normandie. La maison des Launay-Jourdan, était un havre d’hospitalité pour les pauvres et les malheureux. Les pères jésuites se présentaient régulièrement pour visiter les malades, les encourager et leur offrir leur soutien spirituel et sacramentel. Il était aussi coutumier que des missions soient prêchées par des prédicateurs de renom. Ce fut le cas, en 1643, lors de la seconde grande mission prêchée par le père Jean Eudes. Il est certain que Catherine de Longpré était présente (son nom se retrouve dans la biographie de Marie des Vallées, une mystique de l’époque) aux enseignements de ce prêtre français oratorien, courant relié à l’École française de spiritualité. En 1648, le père Jean Eudes s’est signalé par la composition des messes et des offices du Cœur de Marie et du Cœur de Jésus. C’est dans le courant de cette spiritualité qu’il fonda la Congrégation de Jésus et de Marie, dite des Eudistes.
Tout porte à croire que c’est sous l’influence du père Jean Eudes que Catherine de Longpré fit une première consécration mariale dans son jeune âge. Consécration mariale qu’elle renouvela le 25 mars 1648 avant de quitter le monastère de Bayeux pour le Canada. Sur les conseils du père Jean Eudes elle fit aussi 3 vœux : celui de prendre la Sainte Vierge pour sa mère, de ne jamais commettre aucun péché mortel et de vivre en perpétuelle chasteté.
Nous savons, par ailleurs, que Marie-Catherine de Saint-Augustin apporta en notre pays la dévotion au Cœur Immaculé de Marie, dévotion transmise aux jeunes sœurs dont elle avait la responsabilité lorsqu’elle occupa le poste de maîtresse des novices.
Père Paul Ragueneau, jésuite (1608-1680)
En juin 1636, le père Paul Ragueneau arrive à Québec après ses études en France. L’année suivante, il se rend dans la Huronie. C’est alors qu’il rejoint les pères Jean de Brébeuf et Jérôme Lalemant qui l’initient à la mission. Il devient supérieur de la mission huronne en 1645. Il fut témoin du martyre de ses compagnons Jean de Brébeuf et Gabriel Lalemant dont il célébra les funérailles et inhuma les corps le 20 mars 1649. C’est également sous son règne, après le pénible hiver de 1650, que les Hurons émigrèrent et s’installèrent sous la protection du fort à Québec.
C’est dans ce contexte que le père Paul Ragueneau a rencontré la jeune Marie-Catherine de Saint-Augustin. Il devint, pour elle, son confident, son directeur spirituel. Le père Ragueneau était reconnu comme un homme aguerri dans les choses spirituelles, pétri par l’Amour de Dieu et ardent pour le zèle des âmes. Il n’en fallait pas moins pour accompagner l’hospitalière dont la mission en était une de vie totalement offerte pour les habitants de la Nouvelle-France et, bien au-delà.
Cette vie de communion profonde aux souffrances de son bien-aimé Seigneur, Marie-Catherine de Saint-Augustin la vivait en intensité pour que tous et chacun soient libérés des forces maléfiques s’accablant sur eux. Vouloir soulager les autres, ses frères et sœurs en humanité, s’offrir pour les libérer de leurs prisons intérieures n’était pas de tout repos. Et le père Ragueneau l’a vite compris dans sa mission d’accompagnateur et de confesseur de la jeune sœur. Mais le père Ragueneau, était souvent sur la route et devait parfois se rendre en France pour des missions particulières. C’est alors qu’il a demandé à Marie-Catherine de Saint-Augustin d’écrire ses expériences spirituelles et mystiques afin de mieux l’accompagner. De la sorte, même dans la lointaine France, un échange épistolaire pouvait entretenir les liens lors de l’arrivée et du départ des bateaux.
Dans ce contexte, les écrits spirituels de Marie-Catherine de Saint-Augustin ne l’ont jamais été pour être publiés, mais seulement pour être un support à l’accompagnement afin de suppléer à l’éloignement physique de son directeur spirituel. Après le décès de Marie-Catherine de Saint-Augustin, ce fut le souhait de Mgr de Laval, en 1668, de demander au père Ragueneau d’écrire la vie de celle qui, à ses yeux, était un chef-d’œuvre de l’Esprit-Saint et dont la charité héroïque de tous les instants signait la sainteté de sa vie. La vie de la Mère Catherine de Saint-Augustin écrite par le père Paul Ragueneau, jésuite a été publiée en 1671.
Saint Jean de Brébeuf, jésuite (1593-1649)
C’est par l’intermédiaire du père Paul Ragueneau, jésuite que nous découvrons le lien spirituel ou rencontre mystique entre Marie-Catherine de Saint-Augustin et le père Jean de Brébeuf, jésuite. Il faut noter que les deux personnes ne se sont jamais rencontrées de leur vivant. Marie-Catherine de Saint-Augustin arrive à Québec le 19 août 1648 et le père Jean de Brébeuf décède le 16 mars 1649 alors qu’il est missionnaire dans le pays des Hurons. Il est décrit comme ayant vécu, à un éminent degré, les vertus qui font les saints.
En août 1662, voici que le père Ragueneau est rappelé définitivement en France, par sa communauté. Pour Marie-Catherine de Saint-Augustin, ce départ s’avère très douloureux et ce, d’autant plus, qu’il l’accompagne depuis sa dix-huitième année. Elle est alors confiée au père Pierre Chastellain, jésuite et compagnon missionnaire de Jean de Brébeuf. À l’égard de ce dernier, Marie-Catherine vouait un profond respect et une grande dévotion. Elle connaissait la fin brutale et héroïque de la vie de ce missionnaire au cœur de feu.
Et son biographe écrira : « Ce fut à ce grand serviteur de Dieu, à ce grand homme apostolique, à ce premier apôtre des Hurons que Dieu confia le soin spirituel de sa servante (…) afin de lui servir de directeur spirituel et de conducteur, dans un chemin difficile et dangereux, par où la Providence la voulait conduire à la sainteté ». (Ragueneau p. 114) Au fil du temps, il sera non seulement son protecteur, mais elle le considèrera comme son directeur spirituel céleste. Ainsi, par sa présence invisible, il l’invite à prier et à offrir ses souffrances pour la Nouvelle-France. Il l’assistera et lui procurera des secours spirituels jusqu’à la fin de sa vie.
Mère Marie Forestier de Saint-Bonaventure (1615-1698)
Mère Saint-Bonaventure est l’une des trois premières sœurs augustines débarquées en 1639 en terre canadienne. Elle est témoin de l’arrivée de Marie-Catherine de Saint-Augustin dans la communauté en 1648 et elle était supérieure lors de son décès en 1668. Ce sont une vingtaine d’années à vivre sous le même toit en tissant des liens fraternels au milieu des tâches communautaires et hospitalières parfois ardues et imprévisibles dans les débuts d’une nouvelle fondation ; ce « vivre ensemble, » fortifié par les temps de prière communautaire vécus dans la communion des âmes et des cœurs, selon la Règle de Saint-Augustin.
Nous devons à Mère Saint-Bonaventure d’avoir écrit la notice biographique de Marie-Catherine de Saint-Augustin. Il s’agit d’une longue lettre où nous sont rappelés les grands moments qui ont marqué la vie de la défunte et du témoignage de vie qu’elle a laissé dans sa communauté, dans la jeune colonie ainsi que dans l’Église naissante. Cette lettre circulaire datée du 4 octobre 1668 était destinée à toutes les communautés d’Hospitalières de France. Mère Saint-Bonaventure témoigne ainsi : « Mais ce qui est remarquable, c’est que son humilité a été si adroite à se cacher, même à nos yeux, que nous n’avons rien su qu’après sa mort de tout ce qui était de ces grâces si extraordinaires de Dieu sur elle; quoique ses solides vertus, qui font la véritable sainteté, nous la fissent connaître pour une religieuse accomplie, pleine de Dieu et qui gagnait les cœurs à Dieu ».
D’autre part, la lettre circulaire concernant le décès de la Mère Saint-Bonaventure a été écrite en 1698 par la Mère Jeanne-Françoise Juchereau de Saint-Ignace, supérieure. Cette dernière raconte : « Notre Seigneur lui a communiqué plusieurs fois des grâces et faveurs extraordinaires comme fut celle de voir l’entrée dans le ciel de la Mère Catherine de Saint-Augustin; Notre-Seigneur lui ayant sans doute donné cette consolation pour adoucir l’amertume de sa disparition ». Elle a laissé le témoignage dans sa communauté et dans la colonie d’une femme à la charité infatigable et de celle qui a bâti et cimenté l’Hôtel-Dieu et sa communauté en ne ménageant rien pour la mission confiée alors qu’elle a été 22 ans supérieure en plusieurs triennaux.
Rousseau, François. La Passion de servir. Les fondatrices de l’Hôtel-Dieu de Québec. En collaboration avec Denis Robitaille chargé de projet et les Augustines de la Miséricorde de Jésus du Monastère de l’Hôtel-Dieu de Québec. 2014.
Mère Saint-Bonaventure (Marie Forestier). Lettre de la supérieure de l’Hôtel-Dieu de Québec sur la mort de Marie-Catherine de Saint-Augustin 1632-1668. Centre Catherine de Saint-Augustin. 1989.
Sainte Marie de l'Incarnation (1599-1672)
Fondatrice des Ursulines de Québec, Marie de l’Incarnation partageait avec Marie-Catherine de Saint-Augustin une vie de prière intense et un dévouement à la mission d’évangélisation. Elles ont, toutes deux, été des pionnières de la vie religieuse en Nouvelle-France.
Les communautés des Ursulines et des Augustines entretiennent entre elles des liens scellés par un pacte d’amitié. Arrivées sur le même bateau en 1639, elles se sont soutenues au cours de l’histoire, notamment lors d’incendies, obligeant ces communautés à vivre sous le même toit.
Marie de l’Incarnation a écrit, à son fils, après le décès de Marie-Catherine de Saint-Augustin en 1668 : « Elle servait les pauvres avec une force et vigueur admirable. C’était la fille du monde la plus charitable aux malades, et par sa charité elle était singulièrement aimée de tout le monde, aussi bien que pour sa douceur, sa ferveur, sa patience, sa persévérance… Priez notre divin Sauveur qu’il me donne une aussi sainte vie et une aussi sainte mort qu’à cette bonne fille ».
Pépin, Denise. 1990, Chroniques… pour une meilleure connaissance de la bienheureuse Catherine de Saint-Augustin d’après les témoins de son temps... Éditions Don Bosco, Collection des Augustines de Bayeux, Caen, 56 pages.
Saint François de Laval (1623-1708)
Premier évêque de Québec, il fut d’un grand soutien pour les Augustines. Lui et Marie-Catherine de Saint-Augustin partageaient une vision commune : établir et consolider l'Église catholique en Nouvelle-France. Leur collaboration fut marquée par une foi ardente et une dévotion au service des malades et des pauvres.
Il se confiait à Marie-Catherine de Saint-Augustin. De lui, la Mère Saint-Bonaventure écrivait ceci après le décès de Catherine : « Il la consultait très souvent et recommandait à ses prières les affaires les plus importantes de son diocèse ; admirant les lumières et les connaissances que Dieu lui donnait sur toutes choses, jusques dans l’intérieur le plus caché des consciences » (Paul Ragueneau. La vie de la Mère Catherine de Saint-Augustin, p. 213).
Pape Jean Paul II (1920-2005)
Déclare Vénérable Marie-Catherine de Saint-Augustin en 1984.
Déclare Bienheureuse Marie-Catherine de Saint-Augustin en 1989. Le Pape Jean Paul II reconnaît officiellement, en la vie de Marie-Catherine de Saint-Augustin, une vie de charité héroïque et d’offrande perpétuelle auprès des pauvres et des malades. Leur lien spirituel repose sur leur dévotion mariale, l'amour profond de l'Église et le déploiement des grâces de leur Baptême vécu comme un vibrant appel à la sainteté.