Nos mères nous ont transmis
Le 1er août 1639, il y a 383 ans, les 3 premières fondatrices arrivaient à Québec, en provenance du Monastère de Dieppe.
9 ans plus tard, le 19 août 1648, la jeune Catherine, tout juste 16 ans, venait en renfort s'ajouter au nombre de la petite communauté installée depuis à peine 2 ans dans leur monastère-hôpital, qui ressemblait davantage à une cabane rudimentaire qu'à un hôpital.
Ces femmes de la première génération, dont Marie-Catherine de Saint-Augustin a été un lys de pureté parmi le jardin de fleurs que formait ces femmes au cœur d'or, ont été les pionnières qui ont transmis leur précieux héritage aux suivantes.
Le texte qui suit rend hommage aux femmes de notre nation qui ont transmis à travers leurs vies ces trésors spirituels de leurs cœurs, de générations en générations, afin que l'on puisse encore aujourd'hui y puiser.
Dans l'ancien testament, on retrouve l’énoncé « Nos pères nous ont transmis », faisant référence à l'héritage des patriarches transmis de générations en générations. En notre temps, alors que nous vivons une période de grands changements, une période que l’on pourrait qualifier de transition, de charnière entre 2 temps, qui nous mène vers de nouveaux horizons, ceux du 3e millénaire, cet énoncé peut être transposé au féminin face à l'ampleur de l'héritage laissé par les femmes, dans le monde entier certes, mais nous voulons nous arrêter ici sur l’héritage féminin de notre société québécoise tout particulièrement. En effet, elles sont en grand nombre ces saintes femmes, ces femmes fortes dont parle l'Évangile, qui ont été présentes dans l'édification du « Nouveau Monde[1] », qui se voulait déjà être, dans l'esprit de ses fondateurs, une « Civilisation de l'amour » selon l'expression souvent empruntée par notre saint Pape Jean-Paul II.
Construire une civilisation de l’amour; tel était bien le but ultime entrevu par ces pionnières et pionniers français qui s’engageaient corps et âme dans cette entreprise qui paraissait certainement folle aux yeux des hommes, mais « ce qui est folie pour les hommes est sagesse de Dieu ».
Dieu avait donc un plan dans sa sagesse éternelle et il allait le mener à bien malgré toutes les embûches qui semblaient humainement insurmontables. Toutefois, puisque Dieu ne peut rien faire sans la participation de ses créatures, il allait devoir susciter dans certaines âmes le désir de tout donner pour servir Dieu et pour qu’il soit partout « premier servi »[2].
Cette inspiration a résonné dans le cœur de plusieurs femmes au cœur de feu, religieuses et laïques, qui se lancèrent dans l’aventure d’une épopée mystique, à la conquête des âmes pour les gagner à Dieu.
Dès les premiers balbutiements d’une Nouvelle-France qui poussait petitement et sans bruit, des femmes sont venues y insuffler la vie, par leur maternité physique ou spirituelle. Elles ont été les premières mères de cette nation et leur héritage, davantage immatériel que matériel, mais combien riche, s’est transmis et perpétué de mères en filles, autant dans les familles que dans les communautés, tel un fil d’or qui nous relie encore aujourd’hui à nos mères.
C'est notre devoir aujourd'hui de maintenir vivant ce fil d'or, de ne pas le laisser se rompre par les courants de haine destructrice. Non, nous devons nous souvenir de l'amour qui animait le cœur de ces femmes qui nous ont devancées, afin de rallumer notre propre flamme et de pouvoir passer le flambeau à celles qui nous suivront.
Nos mères, elles nous ont ouvert le chemin, par le don d'elles-mêmes dans les joies et les consolations tout comme dans les douleurs, les déceptions et les deuils. Tant d'efforts, de prières, d'espoirs, d'acceptations, de sacrifices ont tracé un sillon lumineux pour les générations à venir. Tout cela est un potentiel méritoire accumulé dans le silence et dans lequel nous n'avons plus qu'à puiser à pleines mains pour le faire fructifier. Car c'est cela qui nous est demandé aujourd'hui : Puiser avec reconnaissance et action de grâce dans les richesses spirituelles que nos mères nous ont transmis.
Geneviève Bernier,
Centre Catherine de Saint-Augustin
Photo : Daniel Abel, L'arrivée des fondatrices en 1639.
[1] En Europe, au temps de la découverte de l’Amérique, on désignait ainsi le nouveau continent.
[2] Devise de Sainte Jeanne d’Arc.
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